« 69 année érotique » chantaient Jane Birkin et Serge Gainsbourg, cultivant ainsi une subtile provocation dans une France à la fois marquée par le conservatisme d’un De Gaulle et à l’aube de la libération sexuelle des années soixante-dix, conséquence du mouvement de mai 1968. Mais que vient faire la Renault 12 dans ce contexte ? Est-elle en phase avec cette exhubérance ?
Renault présente sa nouvelle berline milieu de gamme à l’automne 1969 et l’objectif est de proposer un véhicule de grande diffusion non seulement destinée à la France mais également à d’autres pays du monde. Afin de répondre au plus grand nombre, de limiter les difficultés techniques, il est décidé de proposer un véhicule ultra classique dans sa conception technique : moteur en fonte placé longitudinalement, en porte à faux sur le train avant et avec boîte en bout, pont arrière rigide, freins à tambour à l’arrière, etc… Tout ceci s’oppose aux plus modernes peugeot 204 et Simca 1100 présentées respectivement en 1965 et 1967 avec leur moteur en alliage léger et quatre roues indépendantes. Mais cet arbitrage technique a-t-il pénalisé la Renault 12 ? Que nenni, grâce à son esthétique plaisant au plus grand nombre, mais ne faisant toutefois pas l’unanimité, elle fait partie des véhicules les plus vendus de la marque, il s’en est écoulé environ 4,3 millions d’exemplaires. Elle a peuplé la France entre les années 1969 et 1980 mais dans le reste du monde, elle a perduré jusqu’en 2004, c’est dire si elle est populaire. On pense bien sûr à la Roumanie qui la commercialisait sous la marque Dacia (aujourd’hui bien connue pour ses véhicules low-cost !). A l’époque, le gouvernement Roumain du tristement célèbre Ceaucescu avait fait un appel d’offre à différents constructeurs afin de motoriser le pays. Outre Fiat, Peugeot et d’autres, il y avait Renault qui se distinguait avec un véhicule totalement inédit et encore jamais commercialisé. C’est ce dernier qui remportera le marché, La Roumanie entrant de plein pied dans l’ère automobile moderne et la Dacia 1300 est rigoureusement identique à la version francaise en dehors du logo ! La Turquie, l’Argentine, l’Espagne seront d’autres pays où la 12 sera très présente.
Meilleure vente de Renault avant l’arrivée de la 5, elle sera ainsi la voiture typique de moyenne gamme de 1300 cm³ et 7CV utilisée par les familles. Les quinquagénaires d’aujourd’hui l’ont bien connue dans leur jeunesse et nombre d’entre-eux ont usés leur fonds de culottes sur la banquette arrière de l’une d’elle. Bien que dans ma famille on était plus Peugeot (un de mes oncles étant agent Peugeot, ca aide !), j’ai des souvenirs liés à ce modèle : mon parrain avait une TL phase 2 jaune citron ! ( à l’époque ca ne choquait pas), les parents d’un copain avait une phase 1 TL dans un improblabe beigeasse/vert qui ne la mettait pas particulièrment en valeur. Mais le meilleur souvenir de cette voiture date de juillet 1976 : un oncle éloigné nous avait, mon frère et moi, baladés entre Alsace et Vosges avec sa TS bleue métal phase 2. Assis à l’arrière, nous avions tous le temps d’admirer les magnifiques sièges intégraux si populaires à l’époque. De plus, il n’hésitait pas à faire parler les chevaux dans les lacets des Vosges à grand coup d’accélérateur et de rétrogadage en troisième afin de doubler le quidam en véhicule plus basique. Je trouvais cela super classe et sans le savoir, il allait me donner l’exemple pour plus tard !…
Vous l’aurez compris la version TS me « parlait » : les jantes Fergats, les longue-portées, les sièges intégraux et les baguettes chromées judicieusement placées de la phase 1 la rendait très élégante. La phase 2 avait perdu ses projecteurs supplémentaires et ses jantes Fergats étaient remplacées par des enjoliveurs imitant (mal) le dessin de celles-ci mais compensait par un tableau de bord plus moderne aux nombreux voyants donnant une touche de modernisme.


Evidemment, outre la TS, c’est la Gordini qui a marqué mon esprit : sa teinte bleue combinée aux bandes blanches avait vraiment de la gueule surtout en version allégée de ses pare-chocs. Mais celle-ci n’a pas rencontré le succès escompté, il est vrai que succéder à la 8 Gordini n’était pas facile d’autant que les philosophies de ces deux véhicules sont en totales oppositions : moteur à l’arrière et dérives à gogo pour les apprentis pilotes avec la 8, alors que la 12 et son poids du moteur en avant des roues avant en font une sous-vireuse absolue. Malgré ses qualités, elle n’a pas été comprise et a été rejetée, mais aujourd’hui, il y a un retour d’intéret pour cette version qui développait quand même 113 ch avec un moteur en alliage léger issu de la 16.

J’en profite pour vous proposer quelques variations sur la Gordini sans ses pare-chocs, rabaissée et avec des jantes plus larges de marque Gotti, le tout en différentes combinaisons de couleurs :



Outre ces versions hautes, il y avait bien sûr la finition L d’entrée de gamme qui permettait d’accéder à la 12 pour un coût réduit. La TL qui représentait le milieu de gamme et qui sans surprise, était la plus vendue de toutes. Enfin, avec la plus rare automatique, Renault proposait une offre complète et diversifiée. D’autant plus que la plupart des finitions était également proposées sous forme de break. Pas de coupé ? non, ou presque non, car cette variante était proposée sous la forme des 15 et 17 (voir mon article du 12 mai dernier).
La Renault 12 a aussi connu les affres de jeunes conducteurs qui l’ont « Jacky touch-isé » lui donnant ainsi une image un peu ringarde, certains n’hésitant pas à lui peinturlurer des bandes à la Starky et Hutch sur ses flancs !
Restons un peu sur le kitch (ou pas selon les goûts) et parlons d’une version sportive uniquement disponible sur le marché Argentin : créée pour le championnat de tourisme Argentin, comme la 504 TN évoqué dans l’article du mois de juin dernier, elle est basée sur une phase deux et se prénome Alpine en reprenant ni plus ni moins le moteur de notre 5 Alpine nationale d’une puissance de 110 ch. Sa robe ? Une grosse bosse sur le capot, un spoiler noir, des longue-portées, un peu de couleur or sur les bandes latérales et les jantes rappelant les couleurs emblêmatiques du cigarettier John Player Special. En France nous n’avons jamais eu une telle version ni d’ailleurs un quelconque dérivé sportif à partir de la phase 2.

Au final en Europe de l’Ouest, la Renault 12 laisse place en 1978 à la 18 qui n’est ni plus ni moins qu’une 12 rhabillée d’une carrosserie plus moderne. La mécanique étant toujours quasiment la même !
Comme la 504, elle va connaître un longue carrière hors de France avec des versions pick-up et des restylages jamais connus chez nous faisant d’elle une des Renault les plus produites.
Et donc pour rebondir sur ma question en préambule : dévergondée cette 12 née en 1969 ? Techniquement et pour les versions simples, assurément non, mais les Gordini et Alpine sont plus à même de susciter quelques frissons !
Je n’ai jamais compris pourquoi une carrosserie aussi banale (et aussi laide …) a pu plaire, même dans le contexte de l’époque (que j’ai vécue)
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Les goûts et les couleurs selon les personnes sont différentes, pour ma part, j’ai toujours aimé la Renault 12 et comprend qu’elle ait eu du succès ! 😊😉
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Super cet hommage à la R12 ! Merci
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De rien, avec grand plaisir !
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Bel article Phil !
Christophe
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Merci Helmut !
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