Renault 4, bonne à tout faire

Elle vient tout juste de fêter ses 60 printemps, elle a été diffusée à plus de huit millions d’exemplaires, sa carrière s’est étalée sur plus de 30 ans et on l’a connue sous diverses formes : de la jaune poste à la bleue EDF en passant par la bleu marine Gendarmerie, sans compter celles qui peuplaient nos familles. La Renault 4 fait partie du patrimoine automobile français au même titre que la 2CV. La caricature du Français type le représentait souvent dans le passé avec un béret et une baguette sous le bras, s’il fallait lui coller un véhicule, on pourrait bien sûr prendre la 2CV mais également la Renault 4. Voiture à tout faire, populaire, facile à vivre, à l’aise partout, économique, une sorte de « Jean’s » automobile, tels étaient les critères défini par le patron de Renault de l’époque, Pierre Dreyfus. De plus, techniquement, elle va prendre le contrepied total de la gamme au losange qui était composée exclusivement de véhicules avec transmission aux roues arrières, qui plus est, avec le moteur à l’arrière pour la Dauphine et la 4CV. En effet, elle sera la première Renault de tourisme à traction avant, l’utilitaire Estafette l’ayant précédé. Au moment de l’étude de la Renault 4, Pierre Dreyfus, avec sa bonne sensibilité du marché qui le caractérisait, compris qu’il fallait faire quelque chose de radicalement différent de la 4CV, mieux adapté aux besoins des automobilistes. Ainsi, le moteur passera à l’avant, libérant totalement l’espace situé à l’arrière pour l’habitacle et le coffre. La carrosserie de mini break incluant un hayon, encore une première chez Renault, permettra une modularité encore plus poussée que sa grande concurrente la 2CV. Eh oui, au-delà de remplacer la 4CV, il fallait contrer cette petite Citroën au grand succès. Cette dernière, mise sur le marché bien avant, montrant la voie sur le type de véhicule attendu par une certaine clientèle. Même si Renault s’en est toujours défendu, il faut bien reconnaître que la Renault 4 est une copie améliorée de la 2CV, elle en reprend le concept global en corrigeant ses rares défauts à commencer par un moteur plus vigoureux issu de la 4CV, un classique 4 cylindres refroidi par eau contre le 2 cylindres refroidi par air. Et pour contrer l’argument de l’absence d’entretien d’un circuit de refroidissement à eau inexistant sur la Citroën, Renault va innover en installant un circuit scellé avec vase d’expansion qui produira le même avantage. Les premières Renault 4 seront proposées avec un 747 cm3 et 24 ch. DIN contre 425 cm3 et 15 ch. pour la 2CV. Afin de se mettre au niveau de cette dernière, Renault proposera un moteur de 603 cm3 et 23 ch. dans une déclinaison prénommée R3, mais celle-ci fera long feu, Renault la retirant assez rapidement du catalogue.

Sur une aussi longue carrière, on peut évidemment s’attendre à des évolutions que l’on peut résumer en quatre grandes périodes correspondant aux différents visages de la Renault 4, passons ceux-ci en revue :

1961 – 1967 : le visage triste

La Renault 4 est-elle une belle voiture ? A sa mise sur le marché, elle n’était pas jugée comme telle et cela aurait pu être pire si l’un des prototypes avait été retenu, car certains d’entre-deux manquaient singulièrement de grâce ! Cette beauté mesurée était assumée par le staff qui voulait s’assurer qu’elle ne fasse trop d’ombre à la Dauphine. Pour couronner le tout, on l’a affublée d’un regard un peu triste qui, sur la version de base sans enjoliveur de calandre, parait pauvre de surcroit. Et ce n’est pas le chétif tube, qui n’a de pare-chocs que le nom, qui va contrebalancer cette impression ! Heureusement, ce dernier sera remplacé par un élément chromé plus esthétique à partir du modèle 1963. Mais ce visage se rendra très vite familier dans le paysage automobile Français. Présentée en Camargue à la presse en juillet 1961, sa présentation publique aura lieu en octobre de la même année au salon de Paris, appuyée par une opération commerciale baptisée « prenez le volant », qui permettra à tout un chacun d’essayer la Renault 4 dans les rues de Paris. Pas moins de soixante mille essayeurs vont goûter à la nouveauté. La gamme de départ est assez riche puisqu’en entrée de gamme, on peut opter pour la R3 (3CV) ou la R4 (4CV) reconnaissables à la troisième vitre latérale occultée par un panneau de tôle. En haut de gamme, Renault propose la 4 Super avec une ouverture de coffre originale digne des breaks américains : la vitre arrière s’escamote dans la porte qui bascule en arrière et vers le bas, mais comme la R3, cette singularité sera vite retirée du catalogue. Reste le milieu de gamme choisi en priorité par les clients, la fameuse 4L qui deviendra un nom commun utilisé tout au long de sa carrière, le bien connu « Quatrelle » ! Les ventes de 1962 démontreront que Pierre Dreyfus avait vu juste : avec plus de 195.000 exemplaires vendus, la 4 va prendre la tête des ventes en France juste devant la 2CV et ses 145.000 unités. D’autres finitions seront proposées au cours des millésimes suivant à travers une « L Export » et une chic « Parisienne » réalisée en collaboration avec le magazine « Elle ». Cette dernière étant parée d’une inédite décoration cannée ou écossaise sur ses flancs.     

1967 – 1974 : le visage chromé

En octobre 1967, Renault va faire un premier restyling de son best-seller : La calandre intégrant les phares, devient plus cossue et plus riante grâce aux chromes encore très à la mode en ces années-là. Les pare-chocs s’épaississent et donnent plus de consistance à la silhouette de la 4. La gamme est simplifiée car ne subsistent que la finition de base, l’Export et la Parisienne, qui, au passage, perd ses décorations latérales. L’autre gros changement, technique celui-ci, sera l’adoption d’une boite à quatre vitesses en remplacement de la précédente trois vitesses dont l’étagement était sujet à critique. Ce modèle, je le connais bien, puisque c’est sur la banquette arrière d’une Export blanche (comme celle illustrée ci-dessus) que j’ai usé mes fonds de culottes de marmot ! Acquise en 1970 pour remplacer une 2CV AZAM, mon père avait semble-t-il fait une bonne affaire, car il s’agissait d’une occasion récente avec très peu de kilomètres et au tarif compétitif. Il me reste bien sûr des souvenirs de cette voiture : ses étranges poignées de portes intérieures où il fallait introduire la main dans une ouverture percée dans la tôle afin d’atteindre la palette, ses vitres coulissantes difficiles à manier par de petites mains, le « clong » de la tôle à la fermeture des portes trahissant l’absence d’insonorisant, le tableau de bord beige clair, le rétroviseur intérieur curieusement placé sur le tableau de bord et non au pavillon, et bien sûr l’énigmatique levier de vitesse coulissant qui me semblait être compliqué à manipuler ! C’est aussi la première voiture que j’ai conduite. Enfin presque, car il s’agissait simplement de tourner le volant pour éviter les trous sur un chemin de terre. Mes jambes étant trop courtes pour atteindre les pédales, j’étais sur les genoux de mon père, mais j’ai trouvé cela très amusant ! A l’époque, je commençais sérieusement à m’intéresser aux voitures et je dois reconnaître que je n’étais pas fou de la R4, ne la jugeant pas comme une « vraie » voiture, ainsi, lorsqu’en 1976, elle fit place à une 204 break, pourtant apparue 10 ans avant, j’avais l’impression que nous faisions un gros bond en avant. Sur la période « chrome », l’animation de la gamme sera calme, car il faut laisser un peu de place à la nouvelle Renault 6 qui est en quelque sorte une super 4. A noter toutefois en 1968, une 4 « Plein Air » qui cherchera à chasser sur les terres de la Méhari mais sera abandonnée en 1970, faute de ventes suffisantes.

1974 – 1985 : le visage plastique noir

Mais la « Quatrelle » est increvable, la R6 ne l’ayant en outre pas dérangée plus que ça, après douze années de service, elle s’offre un nouveau face-lift. Cette fois-ci, on passe au plastique noir qui devient très à la mode et qui va perdurer jusque dans les années 80, affublant certains modèles à l’excès quitte à les défigurer. Ce n’est pas le cas de la Renault qui gagne un peu de modernité sur un design désormais daté. La gamme démarre avec les mêmes finitions que sur la «chrome », mais l’Export deviendra TL en 1975 en même temps qu’apparait une version au look plus jeune. Ses couleurs pimpantes tant à l’extérieur qu’à l’intérieur avec ses incroyables sièges rayés, séduiront une clientèle plus jeune, Safari étant son nom de baptême.

Je pensai en avoir fini avec la 4 mais cette dernière va me rappeler à son bon souvenir à travers une « plastique noir » TL bleu métallisé, propriété des parents de Didier, proche voisin et copain de classe qui me convoyait de temps en temps entre nos domiciles et notre lycée.

1978 – 1992 : le visage plastique gris

Crise du pétrole oblige, les constructeurs se doivent de proposer des modèles économiques peu gourmands en carburant. Ainsi, à l’instar de la 5 GTL, Renault va décliner sa 4 dans cette même finition, en reprenant le moteur de 1108 cm3 de 34 ch. DIN de la 6 L.  Elle se distinguera par sa présentation plus cossue, ses protections latérales inspirées de la 5, ses crosses de pare-chocs, sa calandre et ses pare-chocs gris. Cette version va rencontrer un vrai succès et deviendra une finition marquante du modèle. On la verra beaucoup en teinte beige comme celle d’Yves, autre copain, avec lequel nous avons partagé quelques virées dans sa GTL. Il l’avait personnalisée en appliquant une peinture blanche sur les éléments en plastique gris d’origine et surtout en y installant un autoradio performant. Comme aucun emplacement était prévu pour les haut-parleurs, il avait simplement placé des enceintes Hi-Fi de salon dans le coffre ! Je peux vous garantir que les basses du morceau « Les dingues et les paumés » d’Hubert Felix Thiefaine en live, faisaient entrer en résonnance la frêle carrosserie de cette pauvre R4 ! Evidemment, au vu de l’inexistence d’insonorisation, les gens aux alentours en profitaient également ! Au cours des années 80, la 4 va connaître un regain d’intérêt de la part d’un type de clientèle un peu baba cool attirée par sa simplicité, ses faibles coûts d’achat et d’entretien. Aujourd’hui on parlerait de voiture « durable » ! La gamme sera simplifiée à deux modèles, TL Savane et GTL Clan, dont la calandre grise est désormais commune. Celle-ci sera néanmoins soutenue au gré des années par des série limitées telles que les « Jogging », « Sixties », et en toute fin de carrière, « Bye Bye », sorte de clin d’œil après 31 ans de carrière ! Ce sont les normes de pollution qui mettront fin à cet emblème français, l’investissement pour la dépolluer étant trop important pour être rentable. Ainsi, la Renault 4 a traversé trois décennies de progrès automobile sans jamais vraiment changer fondamentalement ! Un véritable tour de force pour cette icône.

En guise de conclusion, je vous propose le poster ci-dessous résumant les quatre visages de la Reanult 4 :

Poster « Les quatre visages de la Renault 4 »

FR – Poster aux dimensions 50 x 70 imprimé sur papier photo de haute qualité garantissant une netteté et un rendu des couleurs excellents. Frais de port supplémentaires en dehors de la France. EN – Poster size 50 x 70 printed on high quality photo paper, guaranteeing excellent sharpness and colour rendition. Additional shipping costs outside France.

70,00 €

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