- Tiens une Simca Horizon trois portes !
- Non mec, ouvre tes yeux en grand et regarde-bien, ce n’est pas une Horizon mais bien une Chrysler Sunbeam !
Eh oui, on peut facilement confondre ces deux véhicules tant leur design est proche, le fait qu’ils soient proposés par le même groupe rajoute à la confusion. Pourtant en dehors de leur forme, tout les distingue : 5 portes, traction avant et roues indépendantes pour l’Horizon. 3 portes, propulsion et essieu arrière rigide pour la Sunbeam ! Cette dernière lancée en 1977, soit la même année que l’Horizon, était totalement à contre-courant de la mode qui passait toutes les voitures compactes aux roues avant motrices. Mais il y a une explication à ces différences et on va voir que la parenté des modèles n’est pas le fruit du hasard.
L’histoire commence au mitan des années 70 lorsqu’il s’agit de remplacer la Simca 1100 : à partir de la mécanique de cette dernière on élaborera le projet C2 qui donnera l’Horizon. Mais la volonté du groupe Chrysler était d’en décliner une version plus petite dénommé « C2 short » à deux portes qui devait à la fois prendre la place de la Simca 1000 et se placer sur le segment de la Renault 5. Mais les finances du groupe n’étant pas au mieux, on voulait profiter de l’arrêt de la commercialisation de l’Hillman Avanger pour fermer l’usine de Linwood qui la produisait. Le gouvernement Anglais, voyant cela d’un très mauvais œil, mis la pression sur Chrysler afin de maintenir le site coûte que coûte. Le constructeur n’y est pas allé par quatre chemins en conditionnant le maintien contre des subventions de l’état ! La situation de l’emploi était telle que le deal fut accepté ! Mais il fallait à la fois sauver le maximum d’emplois Anglais et faire au plus économique, on a donc décidé de reprendre toute la base mécanique de l’Hillman Avanger, produite en Angleterre, et de la rhabiller d’une carrosserie plus moderne réalisé par le bureau de design de Whitley, le même qui a dessiné l’Horizon ! La boucle est bouclée et c’est ainsi que la C2 short qui, au départ devait être une traction avant, devint finalement une propulsion ! Pour la petite histoire, on avait prévu des phares dans le style similaire à l’Horizon mais ceux-ce ne pouvant être prêts pour le lancement, on repris ceux de l’Avanger en les habillant d’un enjoliveur afin de les intégrer au mieux dans la calandre !…

Les deux modèles vont cohabiter dans la gamme Chrysler Europe avec un avantage évident pour l’Horizon au niveau des ventes. En France, La Sunbeam restera dans l’ombre de celle-ci toute sa carrière et sans doute serait-elle passée totalement inaperçue si le groupe n’avait pas décidé de proposer deux variantes sportives en 1979 : la TI alimentée par un 1,6 l de 100 ch et surtout la Lotus qui, avec son moteur 2,2 l fera beaucoup pour la notoriété du modèle et de la marque Talbot. Le patron de la compétition de Chrysler UK, Des O’Dell, voulant développer une voiture pour les rallyes et notant que les voitures à succès de la discipline étaient à l’époque des propulsions, c’est tout naturellement qu’il se tournera vers cette Sunbeam. C’est Lotus qui aura le privilège de la développer et ils ne vont pas se priver d’y greffer leur propre moteur associé à une boite ZF. D’une cylindrée de 2172 cm3, équipé de 16 soupapes et alimenté par deux carburateurs double-corps, il développera 150 ch DIN permettant, avec un poids de seulement 960 kg, une vitesse de pointe de 200 km/h, un 1000 m DA de 28,4 s et un 0 à 100 de 8s !

C’est donc sur cette base que sera développée la voiture qui remportera le championnat du monde des rallyes 1981 avec dans le cockpit deux Français bien célèbres aujourd’hui puisqu’ayant chacun réussi à la tête d’écuries de course : Guy Fréquelin au volant et Jean Todt en coéquipier, ils seront second au classement des conducteurs derrière Ari Vatanen sur Ford Escort.

La Sunbeam Lotus de série, avec sa livrée noire et ses bandes latérales argent laissera un souvenir impérissable aux vrais amateurs de sportives. La France n’aura droit qu’à cette livrée, en Angleterre le modèle bénéficiera d’une plus grande notoriété et sera décliné en d’autres combinaisons de couleurs. On notera d’ailleurs une incohérence : alors que la Lotus et plus haut en gamme que la TI, seule cette dernière aura droit à un spoiler avant, qui est pourtant bien un signe distinctif d’une version sportive ! Allez comprendre… J’en profite pour réparer l’incohérence en vous proposant sur l’illustration ci-dessous une Lotus « plus », en vert anglais qui plus est :

Aujourd’hui en France, on n’en voit plus, de l’autre côté du Channel, le modèle est désormais devenu un vrai collector et des fans clubs se sont créé autour, mais il est vrai qu’elle n’ a été produite qu’à 2308 exemplaires ! Eh oui, la valse des noms n’a sans doute pas aidé à une diffusion plus grande : née Chrysler Sunbeam, elle est rebaptisée Talbot Sunbeam suite au rachat par PSA des entités Européennes du groupe Américain.
Ironie de l’histoire, voilà que quarante ans plus tard on assiste à un rapprochement des deux groupes PSA et FCA !…
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